Tuesday, February 23, 2016

Campus mixtes: une approche novatrice aux nombreux avantages

http://m.ledevoir.com/#article-463237

20 février
INRS
Campus mixtes: une approche novatrice aux nombreux avantages


Thierry Haroun, Le Devoir

« En fait, ce qui existe déjà au Québec, au Canada ou même à l’international, ce sont des collaborations entre chercheurs. Une approche qui a toujours été privilégiée et encouragée, je pense, par les universités. Ce que je propose — et c’est ce qui est différent —, c’est une approche institutionnelle des collaborations entre les universités », fait-il valoir. Daniel Coderre précise du même souffle qu’on laisse souvent entendre que les universités se font concurrence, sauf que… « L’idée que j’émets, c’est que la véritable compétition se fait au mérite auprès des organismes subventionnaires sur le plan de la qualité des projets et la qualité des chercheurs. Elle est là la compétition au fond. »

Daniel Coderre juge que les universités ne devraient pas se concurrencer entre elles, mais qu’elles devraient plutôt mettre en place des mécanismes qui devraient non seulement favoriser la collaboration entre chercheurs, mais qui devraient aussi optimiser les investissements publics à l’échelle des infrastructures technologiques de pointe, notamment. Par exemple ? « Eh bien, par exemple à l’INRS nous avons à notre centre Énergie Matériaux Télécommunications le laser le plus puissant au monde. Donc, la question qui se pose est la suivante : est-il nécessaire de répéter cet investissement dans d’autres universités ? Ainsi, pourquoi ne mettrions-nous pas en place un mécanisme qui permettrait de partager de plus grandes infrastructures ? Pourquoi ne pas les rendre accessibles aux industries qui ne pourraient jamais se payer des investissements de cet ordre-là ? »

Que des plateformes technologiques et autres infrastructures soient « ouvertes », cela se fait déjà dans certaines universités, admet-il. Mais son approche fait un pas de plus. « Ce que je propose, c’est de réunir physiquement, soit dans un même lieu, ces chercheurs, ces infrastructures pour favoriser la collaboration entre chercheurs, entre étudiants avec des antennes industrielles qui sont intéressés par une thématique en particulier. » L’idée n’est pas, dit-il, « de faire d’immenses campus qui réuniraient toutes les universités, dans tous les domaines. Mais bien de faire ce que nous, l’INRS, avec l’École polytechnique et l’Université de Montréal, sommes en train de créer, soit un centre physique pour les chercheurs, entre autres, avec de grandes plateformes technologiques et ouvertes à l’industrie du domaine des nouveaux matériaux ». Nous y sommes.

L’Institut des nouveaux matériaux

Ainsi, l’Institut des nouveaux matériaux, qui prendra place sur le site Outremont de l’Université de Montréal (soit entre les stations de métro Acadie et Outremont), comprendra plusieurs infrastructures, dont un pavillon pour chaque université, un centre en innovation et une aire de développement. Dans son ensemble, le projet engendrera des investissements de plus de 700 millions de dollars. On y retrouvera une centaine de chercheurs, plus de 500 étudiants de cycles supérieurs et 25 chaires de recherche.

En ce qui concerne l’INRS, son nouveau pavillon Énergie Matériaux Télécommunications, qui sera d’une superficie de 24 000 mètres carrés, accueillera entre autres une infrastructure de nanostructures et de femtoscience, un laboratoire en analyse et amélioration des signaux multimédias/multimodaux, un laboratoire en caractérisation des matériaux et un autre touchant la production d’impulsions laser énergétiques et isolées dans le régime des attosecondes. On y retrouvera par ailleurs une chambre anéchoïde, un système de correction de front d’onde pour laser de puissance et une unité de recherche de pointe pour les couches minces épitaxiales et les nanostructures de matériaux fonctionnels, pour ne nommer que ceux-là. Ce pavillon va entraîner des investissements de l’ordre de 150 millions de dollars, dont 120 millions pour la construction du bâtiment et la relocalisation des équipes de recherche, et 30 millions pour l’équipement scientifique de pointe. Si tout va comme prévu, l’inauguration du site aura lieu en 2019, indique Daniel Coderre.

« C’est un peu une révolution que l’on propose dans le monde de la science, dit-il. En fait, on est contraints de le faire parce que la science n’est plus celle qui se faisait sous une cloche de verre où un chercheur s’isolait pendant toute sa carrière et, éventuellement, faisait des découvertes. Nous sommes désormais dans un mode obligatoire de collaborations. Et ça, les chercheurs en conviennent. » Et au-delà de cette approche qui vise l’optimisation des savoirs scientifiques et des collaborations, voire des partenariats, ajoute-t-il, l’autre avantage de ces partages a ceci de bien qu’elle « optimise l’utilisation des fonds publics en cela qu’on ne dédouble pas, ne triple pas ou ne quadruple pas des investissements », pour une même infrastructure technologique.

Le grand ouf… des scientifiques

On le sait, sous les conservateurs de Stephen Harper, les chercheurs étaient muselés et la publication de leurs articles prenait les allures d’un chemin de croix. Le seul fait de pouvoir accorder une entrevue à un journaliste tenait du fait d’armes. Depuis l’arrivée du gouvernement Trudeau, les chercheurs respirent beaucoup mieux. C’est vrai, non ? « Absolument, c’est comme un vent de fraîcheur, d’espoir », confirme Daniel Coderre. D’autant plus, dit-il, que Justin Trudeau a démontré depuis qu’il est au pouvoir l’importance qu’il accorde à la science au sein de sa gouvernance. « Écoutez, je siège au sein du conseil d’administration d’Université Canada. Et nous avons eu la visite spontanée de Justin Trudeau une ou deux semaines après son élection pour nous dire à quel point la science est importante pour son gouvernement. »

No comments:

Post a Comment